Le Ravel rail de Herstal à Saint Léonard
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passerelle Vivegnis photo gracq |
Bientôt nous aurons un Ravel Rail, de la gare
de Herstal à celle de Vivegnis. Ravel = Réseau Autonome des Voies Lentes. C’est
le chemin le plus direct jusqu’au centre de Liège : seulement 3,3 kilomètres! La
première partie, sur le territoire de Herstal,
est pratiquement finie. La partie Liège est en gestation, mais on peut
passer la rue des Vignes et l’Impasse Marcors très tranquilles.
La balade part de la Place des Demoiselles en
souvenir de l’histoire motocycliste de Herstal, avec Saroléa, Gillet, Bovy ou
Brondoit. Ne fixez pas de rendez-vous à la gare de Herstal: il y en a
trois !
Un PANG et deux éléphants blancs
La gare de Herstal est
un PANG pour la SNCB (point d’arrêt non gardé ; en fait un abri pour un
distributeur de billets). Pour le reste, il y a deux éléphants blancs, des
réalisations d’envergure prestigieuse qui s’avèrent en définitive plus coûteuse
que bénéfique et dont l’exploitation ou l’entretien devient alors un fardeau
financier. Les éléphants blancs étaient des cadeaux prestigieux que les princes
de l’Inde s’offraient mutuellement. Et pour les moins nantis de ces princes, un
tel présent n’allait pas sans poser de problèmes. https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89l%C3%A9phant_blanc_(expression)
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ancienne gare photo P.Maes&ass. |
L’ancienne gare est
toujours propriété de la SNCB, mais Urbeo la régie communale autonome immobilière de Herstal, a un droit d’emphytéose de 50 ans. Selon Urbeo, «les lieux seront polyvalents et pourront
évoluer pour s’adapter aux modifications d’activités qui interviendraient au fil
du temps. Le bâtiment a été entièrement vidé et isolé par l’intérieur, afin de
tenir compte de la qualité architecturale, des contraintes constructives et de
la valeur du bâtiment dans la mémoire collective. Deux niveaux ont été réalisés
à l’aide d’une nouvelle structure. Le projet est cofinancé par les fonds
européens (FEDER : 640.000 euros ; Wallonie/FWB : 800.000 euros). » et conçu par le bureau d’architecture Pierre Maes & Associés.
Cette ancienne gare n’est pas la première.
Elle date de 1914. Des mauvaises langues disent que les premiers à débarquer
étaient des casques à pointe allemands, et qu’ils avaient même en bon allemand
payé leur ticket avant d’embarquer….
La nouvelle gare, en
béton rouge, n’est pas une gare : « la Ville de Herstal a pris les
choses en mains alors que la SNCB abandonnait l’idée d’une gare à
Herstal ». Ca sert à quoi alors ? J’ai un bout d’explication dans la
Gazette de Herstal de novembre 2021 : « la tour constitue ‘le
bâtiment signal’ qui permet de diriger les navetteurs quand ils arrivent sur
les quais ». Ah oui ? Les diriger vers cette tour vide ? Le top,
c’est que ce bâtiment, conçu par les bureaux Arcadis,
SUMproject et ARJM,a
obtenu le « Prix wallon de l’Architecture ». Je veux bien que le
fonctionnalisme n’est plus à la mode, cette architecture d’entre deux guerres
pour qui la fonction crée la beauté. Mais de là donner un prix à un éléphant
blanc (ou plutôt rouge dans ce cas de figure) me fait douter de ce prix. des
réalisations d’envergure prestigieuse qui s’avèrent en définitive plus coûteuse
que bénéfique et dont l’exploitation ou l’entretien devient alors un fardeau
financier. Les éléphants blancs étaient des cadeaux prestigieux que les princes
de l’Inde s’offraient mutuellement. Et pour les moins nantis de ces princes, un
tel présent n’allait pas sans poser de problèmes.
La Compagnie du chemin de fer Liégeois-Limbourgeois
La Compagnie du chemin de fer
Liégeois-Limbourgeois créée en 1865 prévoyait une ligne de Tongres à
Ans, passant par Glons, avec un embranchement vers Liège, et passant par
Herstal et le faubourg Vivegnis, et une ligne de Hasselt à Eindhoven et de
Hasselt à Maestricht. La ligne a joué plus tard un rôle important pour relier
le bassin minier limbourgeois et le bassin industriel liégeois. Cette ligne desservait la FN et les Acec, la sucrerie de Liers, ainsi que les
Charbonnages d’Abhooz et Bonne-Foi, la Bonne Espérance, la Batterie, Bonne-Fin
et Violette et les Charbonnages de la Grande Bacnure. Sur la bretelle
desservant de l’Acec la star architecte Paola Vigano a dessiné une Low Line. Elle
veut sur les deux kilomètres de l’ancienne ligne ferroviaire faire un axe de
mobilité réservé aux piétons et aux cyclistes, un peu comme la « high
line » de New-York. « Sauf qu’on
resterait au niveau du sol. Une ‘low line’, si vous voulez, entre le site et la
gare. » La Ville de Herstal avait réfusé de faire rouler le tram sur ce
tracé avec l’argument qu’exproprier ces fonds de jardins allait pomper trop de
ressources. Or, si on l’a refusé pour le tram, on le ferait pour cette ‘low line’ ?
Et Paola Vigano a complètement oublié la mobilité transversale, du Ravel Canal
justement vers la cité de l’Europe. Et le Ravel 76 qui s’arrête aujourd’hui sur
ce carrefour très fréquenté. Et il y a des tronçons d’un Ravel rail aussi
en direction de Milmort.
Nous suivons le nouveau piétonnier qui longe
les voies. Ce piétonnier a été aménagé par Infrabel en compensation pour la
suppression de deux des trois passages à niveau qui ne servaient plus qu’à
quelques rares piétons pour sortir leur chien.
Le Motorium Saroléa
Du Ravel on a une belle vue sur l’arrière des
bâtiments industriels de Saroléa. En 1892 on y monte les bicyclettes Royale Saroléa. Puis Saroléa produit en 1901
des vélos où l’on a monté un moteur à pétrole quatre temps de 247 cm3. Pour
l’Exposition universelle de Liège en 1905, Saroléa sort deux modèles avec un
moteur révolutionnaire bi-cylindres en V. Léopold II en possèdera une. Les motos
gagnent Paris-Nice et Paris-Liège. Le
bâtiment de 15 000 m² sur trois étages date de 1928. Cette usine était capable
de produire 75 motos par jour. Saroléa produisait tout elle-même, les roues,
les moyeux, les moteurs, les boîtes de vitesses, les cadres… L’usine ferme en
1963.
Le tandem Saroléa/Gillet approvisionnera
encore l’armée belge en pièces de rechange pour motos jusqu’en 1973, date de la
disparition définitive des activités. De 1901 à 1963, Saroléa a construit
100.000 motos, la production actuelle d’une marque japonaise… en un mois! Depuis
1998, l’AIGS s’y est installé. Pour voir des Demoiselles de Herstal, il faut aller au musée du cycle à Ampsin
ou le Musée du Circuit Spa-Francorchamps à Stavelot.
Les bornes de puits de l’ancien charbonnage de Belle-Vue
A hauteur de la Marée, on est sur le terrain
de l’ancien charbonnage de Belle-Vue. A 4 mètres du sentier, deux puits de mine,
marqués par des bornes récemment rénovées. L’abrégé BV-BV + 002 indique le n°
du puits. Dans tous les charbonnages modernes il y avait au moins 2 puits,
utilisés tant pour la translation du personnel que pour la remonte du charbon.
Mais le puits n°1 – puits principal – servait toujours de puits d’entrée d’air
et le puits n°2 – puits secondaire – de retour d’air. L’air, servant à
l’aérage des galeries et des tailles du fonds de la mine était aspiré et
refoulé par des ventilateurs et acheminé dans tous les recoins de la mine par
un circuit de porte ouvertes et fermées. L’aération avait pour but
d’amener de l’air frais là où travaillent les ouvriers mineurs, mais aussi
d’éliminer l’air vicié par le CO2 et par le grisou qui se dégageait des
couches de charbon, en plus ou moins grande quantité suivant le charbonnage. Les
chiffres 202002 – 202 sont le n° de la Concession de Belle-Vue et Bien-Venue.
Ces concessions existent toujours au niveau juridique.
Nous prenons le tunnel cyclo pédestre . Au
départ Infrabel avait mis des escaliers au lieu d’une rampe comme le prévoyait
le permis. En fait, Infrabel aurait pu dégager un passage sous voie comblée qui
servait à transférer les inertes de la paire de Belle Vue vers le terril.
Le Ravel Rail
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maison du skip photo E.van Loo |
En sortant du passage sous-voie nous avons sur
notre droite la Ruelle des Renards, avec la maisonnette marquée au fronton
‘1923’ qui abritait le treuil de la mise à terril.
Cette ruelle est un tronçon du Sentier des
Terrils, 300 km, de Bernissart à Blegny-Mine.
Ensuite nous avons sur notre droite plusieurs
départs de sentiers, qui menaient vers des jardins. Un de ces sentiers permet
de passer entre les deux terrils de Belle-Vue et de Bernalmont. Le dernier (assez raide) permet l’accès à un sentier qui longe
le Bernalmont et qui débouche dans la rue des Petites Roches.
Juste après le treillis anti-éboulement une
veinette de charbon apparente, qui a quand même un nom: « Beguine » (parce que
stérile, non exploitable). Une deuxième,
«Halballerie», est cachée sous le treillis. A la Bacnure cette veine a
été exploitée à moins 227 mètres! Ces veines en affleurement, donc visible en
surface, ont été repérées lors de la construction de la tranchée du chemin de
fer.
Les terres de l’Evêque
La rue Bois de l’évêque servait aux princes-évêque
pour visiter leurs nombreuses terres à Herstal. La ferme dite de la
Charlemagnerie s’appelait autrefois la ferme du séminaire. La cité de la
Préalle que j’habite a été construite en 1928 sur les terres de l’Evêché, qui y
avait aussi une carrière d’où rue de la Carrière) ainsi que les ‘Sept Bonniers’
où se trouve notre maison médicale et le site de la FN.
Au dessus de la rue du Bois de l’évêque, là où
il y a aujourd’hui une cabine électrique, se trouvait une passerelle. Dans le
fond d’un des jardins débouche un tunnel qui reliait la paire de Bernalmont,
derrière Coronmeuse, et les sièges de Cloes et de la Petite Bacnure. Un
branchement arrivait au pied du terril de Bernalmont.
La rue change de nom et devient la rue Joseph
Truffaut. Nous sommes sur le territoire de Liège. Un découpage bizarre qui a
son origine dans les tractations parfois obscures des fusions des communes des
années 70.
La rue et le parc des Vignes
Nous longeons le chemin de fer via la rue des Vignes. Le Boulevard Solvay
au-dessus de nous est un sous-produit de l’expo de 1905 qui a tracé des
boulevards de circonvallation. Le parc des Vignes est très délabré, au point où
la Ville a interdit le sentier qui monte sur la Tribouillet. L’absence de
contrôle social explique évidemment la découverte macabre du 11 décembre 2006: des jardiniers de la Ville de Liège y découvrent un sac
de sport rempli des ossements d’un bébé. Très vite on fait le rapprochement
avec la disparition signalée par Angela Baptista Santos Freitas de son enfant
soi-disant enlevé par son mari, l’année précédente, le 25 septembre 2005.
Nous restons dans le horreurs, avec le Pont des Bayards où ont été retrouvés
les corps sans vie de Nathalie et Stacy, en 2006. Cinq coquelicots géants en
acier d’Alexandra Gadina, à l’époque étudiante à l’Académie des Beaux-Arts de
Liège, commemorent leur souvenir.
La paire du Charbonnage du Bâneux
Nous prenons l’Impasse Marcors pour déboucher
sur la paire du Charbonnage du Bâneux, une des mines les plus anciennes de
Liège, mentionnée déjà en 1585. Il a été fermé en 1942. Son puits atteignait
350 m de profondeur. Une galerie part d’ici vers le charbonnage de Batterie au
Thier à Liège. Dans les galeries
abandonnées de Bâneux on a fait des recherches pour les petites victimes d’Ait
Oud, pour les retrouver finalement dans un caniveau, le long du chemin de fer,
quelques centaines de mètres plus bas …
Une passerelle vers les Coteaux de la Citadelle
Le 29 février 2020 a été inaugurée la passerelle Léon Tchiniss, en prélude aucarnaval du Nord qui démarrait de là. Léon Tchiniss est l’emblème du carnaval.
Le premier projet de passerelle remonte au «schéma directeur de la ZIP/QI Nord
– Saint-Léonard» de 1997. Un concours d’architecture fut lancé en 2004. Le
projet définitif fut arrêté en 2014. Les travaux ont débuté fin 2017 (1,5 millions €, subsidiés par «Liège Europe
Métropole» et la Région Wallonne dans le cadre du plan «Revitalisation urbaine
– Opération Vivegnis»).
Elle relie un quartier très dense avec les 90
hectares des Coteaux de la Citadelle, classé patrimoine naturel de la Région
wallonne, 13 kilomètres de promenades pédestres et ses trois étoiles au Michelin.
La passerelle a été lauréate du concours
international Green Solutions Awards de 2019, comme infrastructure exemplaire
contribuant à la lutte contre le changement climatique. Et l’association des
architectes Maximilien Cornet et Alain Richard s’est vu décerner le Grand Prix
Green Infrastructures sur base de trois critères. 1° La cohésion sociale, avec
la valorisation de la place et le lien avec un espace vert permettant le
regroupement, l’interaction et la rencontre des habitants du quartier. 2°
l’impact environnemental. 3° la durabilité de la structure, garantie en
purgeant le bois de son aubier, en évitant toute stagnation d’eau et en
assurant une bonne ventilation des assemblages.
La pose a exigé un important convoi (37,5 m de
long sur 3,5 m de large et sur une hauteur de 4,30 m) et une grue avec un bras
télescopique de 70 mètres. Cette nouvelle structure servira également à terme
de jonction cycliste pouvant mener jusqu’à la gare de Herstal. (Ls 26/1/2013)
La Gare de Vivegnis
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la gare vers 1960 |
La gare disparue de Vivegnis était au départ une
gare terminus pour le chemin de fer Liégeois-Limbourgeois. En 1865 la Société
St Léonard situé sur l’actuelle
Esplanade construisit 3 locomotives pour elle. Cette usine n’a jamais été
reliée directement au chemin de fer éloigné seulement quelque centaines de
mètres.
La
ligne a été reliée aux autres gares de la cité ardente en 1877. Pour boucler la
« petite ceinture » liégeoise il a fallu
quatre tunnels. Le petit souterrain du Baneux (57 m.) fut mis à ciel ouvert
lors de la mise au gabarit électrique en 1877.
Avec ça, le faisceau de garage de Vivegnis fut réimplanté à Liers, qui
devint donc la « Tête de ligne».
La gare de Vivegnis sera exploitée jusqu’au 29
janvier 1972. A son heure de gloire, Vivegnis desservait le charbonnage du
Baneux. Il est question d’y recréer un
point d’arrêt dans la cadre du Réseau Express Liégeois.
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photo Artisan graphique |
C’est dans la gare de marchandises que l’on
débarquait les travailleurs italiens. La marchandise, c’était eux, vendus pour
un sac de charbon. Anne MORELLI raconte que la main d’oeuvre est ‘rangé’ par
numéro de puits et arrive à destination sur les camions non bâchés, crasseux,
qui venaient de transporter du charbon. Dans la deuxième moitié de 1946, un
millier d’Italiens arrivent ainsi chaque jeudi dans les mines belges.
Freddy Ingenito du collectif du Bâneux (Cobâ)
a voulu commémorer cette histoire par l’œuvre de deux artistes du quartier, François
Müller et Nicolas Ghilissen, du collectif « Artisan Graphique ». Nicolas
explique que « quand on s’approche ces panneaux en acier Corten perforés de
multiples trous, on est totalement dans l’abstrait. On voit une nuée de points,
mais avec le recul, on peut appréhender la signification. » Le monument représente le travail dans la
mine et l’arrivée des familles en Belgique. Selon Alain Jacquet, président de
CoBâ, «il ne s’agit pas seulement de charbon. Il y a un aspect social avec
l’arrivée des familles en train. » On vient de
l’inaugurer en novembre 2021.
L’habitat groupé des « Zurbains »
Le financement de
la passerelle était en fait lié à l’investissement privé de 4 millions d’euros
de l’habitat groupé des « Zurbains ».
En 2005, vingt-six personnes qui ne se connaissaient pas vraiment, rachetaient
un terrain vague de 8.500 m² pour y construire un habitat «développement
durable ». Un premier retard surgit lorsqu’on se rend compte qu’Infrabel est
propriétaire d’une partie du terrain. En 2007, feu vert pour les travaux. Sept
ans plus tard, 4 maisons individuelles, 13 appartements, 10 duplex et un loft
sont habités, mais « ce n’est pas facile de s’entendre entre 29
propriétaires différents », expliquait Muriel Frenay, présidente de l’asbl.
Aujourd’hui cela me semble une ‘unité d’habitation’ bien vivante.
La brasserie Lourtie-Dor de la rue Vivegnis
fondée en 1892 brassait la Tcheco et la Vivegnis. Elle ferme en 1940 et est
rachetée dans les années 50 par la brasserie Haecht (aujourd’hui Haacht, à
Boortmeerbeek, avec la Primus, la Flandrien, la Duff, la Tongerlo, la Charles
Quint), qui l’utilise comme dépôt. Fermé dans les années 70, le site est
assaini en 1996 par la Sorasi, puis laissé à la merci des squatters. http://www.dhnet.be/archive/un-nouvel-avenir-pour-la-brasserie-haecht-51b86432e4b0de6db9a472fc
La Ville l’achète à la SPI pour 8,9 millions de francs et y installe la mairie
de quartier.
Place Vieille Montagne
Les rues Dony, Moresnet, Mosselman réfèrent à
la Vieille Montagne. Un décret impérial de Napoléon concède la mine
de Moresnet au ‘chimiste‘ liégeois,
le chanoine Jean-Jacques Dony, pour 50 ans, avec obligation de prouver qu’il
est capable de produire du zinc à l’état métallique. Il démarre une usine dans
le faubourg Saint-Léonard en 1809. Dony parvient à produire un métal malléable,
résistant à la corrosion, facilement laminable et d’un prix modique. En 1811, à
titre promotionnel, il couvre l’église Saint-Barthélemy d’une toiture en zinc.
Il ne lui trouve hélas pas de débouchés. En 1813, complètement ruiné, il abandonnera
l’entreprise en 1818 au financier Mosselman.
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image chst |
Le nouveau métal est néanmoins tellement
prometteur qu’en 1814-1815 le Congrès de Vienne crée pour ce gisement de zinc
le Moresnet neutre, un minuscule territoire indépendant. Un pouvoir municipal
dirige le territoire, jusqu’à l’épuisement de la mine en 1885, sous le regard
de commissaires royaux belges, hollandais et allemands. On y battra monnaie et
émettra des timbres. En 1837, Alfred Mosselman crée la société anonyme ‘Société
des Mines et Fonderies de zinc de la Vieille Montagne’, avec des sites de
production à Moresnet, Saint-Léonard et Angleur. Cette S.A. s’appelle
aujourd’hui Umicore…
Le procédé de Dony revenait à condenser les
vapeurs de zinc (le métal fond à 420° et s’évapore à 907°C). Ces vapeurs de
zinc empestaient le faubourg. En 1856, les gens de Saint Léonard, écologistes
avant la lettre, exigent le départ de cette usine qui empestait
l’atmosphère. Lorsque la ville accorde un délai supplémentaire à la fabrique,
le porte-parole du Comité contre la VM démissionna de son poste de
conseiller communal et se présente au scrutin communal, où la majorité sortante
subit un cinglant échec : « la
république démocratique et sociale vient de battre … les libéraux« .
L’usine de Saint Léonard fut fermée en 1881. La VM lotit le site, après avoir
obtenu de la ville la création de trois
rues et la place « Vieille Montagne »
où l’école fut érigée en 1906.Elle accueille des élèves de 27 nationalités
différentes. Une richesse dont se targue la directrice : «L’ouverture d’esprit est le maître-mot de
notre établissement ».
L’origine
des boulets liégeois
Via la rue Dony, avec ses Maisons Talbot nos 2 et
4, nous arrivons dans la rue Saint
Léonard. Sur notre droite le site de la fonderie de canons, aujourd’hui
l’athénée royal Liège-Atlas. La fonderie de canons faisait des canons et ses
boulets. En septembre 1807, le Préfet du Département de l’Ourthe reçoit la
missive suivante: « S.A.I. la Princesse Borghèse, sœur de Napoléon, se rend
demain à Chaudfontaine pour y prendre les bains. Elle désire qu’il soit
transporté à Chaudfontaine 6 boulets de 6 et une pince pour les tirer du feu;
ces boulets doivent être rougis pour réchauffer l’eau du bain de la princesse. »
Le Directeur répond : « je n’ai point de boulets de 6, mais je pense
que pour l’objet dont il s’agit, les boulets de 8 seront meilleurs ». Ce
qui explique que le boulet liégeois est un peu plus gros qu’un boulet
‘ordinaire’…
Napoléon installe sa fonderie de canons dans
l’ancien prieuré de Saint-Léonard. Un paquet d’usines se sont installées dans
les anciens couvents vendus en 1799 comme bien national. Le couvent des
Récollectines est acheté par John Cockerill qui y installe sa Linière. La
Société Saint-Léonard s’installe en 1826 dans l’ex-couvent des Carmélites.
Cette usine construira en 1839 sa première locomotive, et livrera en 1865 des locomotives pour le chemin de fer Liégeois-Limbourgeois.
Rue du Cdt Marchand : un fait divers qui a fait basculer
la bataille pour les forts de Liège
C’est là que le 6 août 1914 a basculée la
bataille pour les forts de Liège. Le général Leman, commandant la Position
Fortifiée, avait installé son QG à côté de la fonderie qui était devenue Royale et qui le
restera jusqu’en 1949. La nuit avant, des soldats allemands avaient été chassés
de Rhées et du fort de Liers. La hasard fait qu’ils descendent sur Liège
et arrivent devant le QG belge. Des
civils les acclamaient, croyant qu’ils étaient des Anglais. L’escouade
allemande tue le commandant MARCHAND. Cette attaque-surprise amène Leman à
quitter dare dare cette maison dans l’actuelle rue Cdt Marchand (elle fut
démolie en 1972 pour l’Athénée) et à renvoyer toutes les troupes de ligne en
arrière. Suite à ça, les allemands étaient maîtres des intervalles entre les
forts et pouvaient les bombarder à leur guise.
On peut ne pas s’en rendre compte, mais nous
sommes ici sur le Ravel de liaison Meuse-Liers qui passe par la rue Borgnet, la rue
Saint Léonard, la rue de la Cablerie, et les quais de Coronmeuse pour déboucher
sur la Ravel Meuse au pont Atlas. Un trajet très ‘urbain’ un peu limite pour un
Ravel. Aujourd’hui on aurait la possibilité de faire la liaison via la ruelle
des Renards que nous avons croisé en début de notre balade.
Le Parc d’entreprises PIEPER : un site centenaire
Rue de la Câblerie s’est installé le Parc
d’entreprises PIEPER sur l’ancien site « CE+T », une usine de
matériel électrique qui était devenue une friche urbaine depuis sa fermeture en 1997. La
SPI+ a assaini les 3.382 m² pour attirer des entreprises compatibles avec la
zone résidentielle urbaine avoisinante. Ce concept novateur a été distingué
lors du concours international RegioStars Awards, un prix mérité pour ce bel
exemple de mixité fonctionnelle et de récupération d’une friche industrielle.
C’est une rupture avec un business model de la SPI est basé sur l’expropriation
de terres agricoles. « Pour ce site, il faut compter 62 euros le m2 contre 13 à 32
euros dans les zonings. Et encore, nous n’intégrons pas tous les frais. Acheter,
assainir et équiper un terrain en ville revient plus cher que créer un zoning
».
Ce site a une histoire séculaire : Henri
Pieper, d’origine allemande, s’installe à Liège en 1866 avec une manufacture
d’armes. En 1889 il fonde avec son fils la Compagnie Internationale d’Electricité, une
dizaine d’années seulement après
l’Américain Edison. Grâce à un contrat signé avec Edison en 1885 pour les
lampes à arc, cette société installera l’électricité intérieure du Conservatoire
de Liège, grande innovation pour l’époque. En 1892, le fils Pieper électrifie
les tramways liégeois et conçoit ainsi
le premier tramway électrique en Belgique. Pieper Herstal fournira en 40-45 des
mitrailleuses pour la Luftwaffe. L’usine sera la cible de la RAF et est mise
sous séquestre à la libération.
Les quatre Tourettes: le seul bâtiment classé à Saint Léonard
À côté de l’église Sainte-Foy, au bout d’une
ruelle se trouve la chapelle sainte Rita, très bien entretenue et toujours
fleurie. Rita est la patronne des causes désespérées dont les malmariées…
Le «Château des quatre Tourettes» était primitivement entourée de douves datée
de 1512 (l’an mil ccccc et XII /). Gravé autour de l’arc du portail d’entrée le
texte « Damoisel Alid Piete de Malle
/ a faiect faire cte maison ».
Le parc du château s’étend jusqu’à la rue
Morinval et aurait dû être aménagé en un parc public, mais la ville n’a pas
réussi à trouver un arrangement avec les 4 Tourettes. Ce qui explique que le
passage entre les 16 nouveaux logements aboutit sur un bout de parc minuscule
(580.000 euros, un un partenariat public-privé avec T.PALM, financé grâce au subside de rénovation
urbaine, un mécanisme régional qui donne un euro public pour un euro privé
investi). Le seul gagnant de cette opération est l‘école
Morinval, à l’étroit dans sa petite cour de récréation, qui a un accès direct
au nouvel espace vert.
Les logements sociaux de type Mulhouse
Nous n’allons pas jusqu’à la Rue Brahy et la
Rue Bailleux, avec leur cité Benoît construite en 1880 : 2
alignements de maisons et jardinets auxquels font face des ateliers
destinés aux armuriers.
Nous prenons la rue Borgnet à gauche avec ses
logements sociaux de type Mulhouse. Le quart de la maçonnerie étant commune, ainsi que la toiture, les
citernes, les puits et les fosses, l’économie était appréciable. En 1853 la
Société mulhousienne des cités ouvrières en construit un petit millier. Le
modèle a été peu appliqué en dehors de Mulhouse. En 2019 nous avons poussé une
pointe jusque là. Ca méritait bien un blog https://hachhachhh.blogspot.com/2019/10/des-logements-sociaux-de-type-mulhouse.html
La rue Derrière Coronmeuse.
Nous revenons sur le territoire de Herstal
avec la rue Derrière Coronmeuse, avec les ateliers des Tramways Unifiés de
Liège et Extensions (le tram nouveau aura ses ateliers à Bressoux).
Et à côté les bâtiments et la paire inférieuredu charbonnage de Bernalmont. La paire supérieure était à Bernalmont. Lors
de la fusion de la Grande et Petite Bacnure, on réunit les deux sièges par un
tunnel qui partait d’un étage inférieur du puits de la Petite Bacnure, à – 30
mètres, pour arriver à – 47 mètres au puits de Gérard Cloes et de là aboutir à
Coronmeuse dans la rue J. Truffaut entre les maisons nos 49 et 53. Nous vdenons
de passer par là.
A la paire inférieure une partie de la
production est lavée. Les résidus du lavoir sont mises à terril. En 2004 Ecolo propose
un parking-relais sur le site : «500
emplacements y sont réalisables ; ce chantier mériterait une concertation
avec la commune de Herstal». Personne n’a repris l’idée, mais le problème
est revenu d’une actualité brûlante. Le P+R existant derrière l’ex-Patinoire a
disparu pour faire place à l’éco-quartier Rives Ardentes et l’arrêt Coronmeuse
du tram risque de devenir pendant de longues années terminus, où il faudrait
prévoir des centaines d’emplacements de parking, plus une gare de bus, dans un
plan de mobilité bien conçu…
Coronmeuse
Nous voilà à Coronmeuse, une espace chargé
d’histoire ! L’immeuble aux numéros 24-29 fut construit en 1780 par Jean
Gosuin. Le bas relief du fronton représente la Justice, avec dans la main
droite sa balance, et cinq fusils appuyés contre le fût d’un canon ; des
boulets de canon. Une association un peu étrange de la Justice avec des armes,
mais tout à fait à l’image de son commanditaire dont le meilleur ami Ransonnet proposait
en 1787 déjà de régler à sa façon le sort du prince-évêque : «Des procès! des enquêtes! C’est la guerre
des lâches. Qu’on abandonne la sainte écriture et les plaideurs à leurs
rêveries, ce sont des armes rouillées.» Les «bonnes armes » se trouvaient
chez son ami Gosuin, le marchand de fusils.
La petite-fille de Gosuin, Valérie Desoer, Vicomtesse de Clérambault, lègue à sa mort en 1896 la maisonaux Hospices Civils de Liège, qui la vendent en 1897 à un certain Bonhomme qui
en fait un immeuble de rapport, loué par chambres et ‘quartiers’. Plus d’un siècle plus tard, la Région
Wallonne sortira LES DIRECTIVES COMMUNALES POUR RESTREINDRE LES DIVISIONS D’IMMEUBLES
pour combattre le phénomène de
subdivision des immeubles. Je
cite : « Cette découpe,
classiquement, est effectuée par un propriétaire soucieux de pousser au maximum
la rentabilité de son bien et qui, à cette fin, fait de sa maison unifamiliale
un immeuble de rapport ; concrètement, il scinde le bâtiment et y crée
plusieurs unités de logement En raison des excès du passé (qui ont vu des
propriétaires « saucissonner » de manière excessive des maisons en une
multitude de micro-appartements exigus et sous-équipés où la dignité humaine
s’abîmait) les communes concernées ont résolu de lutter de la sorte contre la
subdivision des immeubles ».
La Province l’achète en 1924 pour y installer
une école d’infirmières avec internat. L’école s’installe au Barbou, mais l’internat
reste.
Au numéro 26, juste à côté, la maison Lem, classée
en 1973. Propriété de la famille Lem en 1700, porte l’enseigne: à la croix
d’or. La façade a été reconstruite en style Régence.
Le Lion
Rouge, au numéro 18,
était en 1700 une brasserie.
L’Esplanade de la Paix
En 2009 le promoteur Visimmo avait voulu
construire une ‘tour infernale’ de 26 étages sur l’Esplanade. Ce projet a été
bloqué par la mobilisation du «Collectif
pour la protection de l’esplanade de la Paix » (LM 16/1/2009). En
septembre 2021 un nouveau projet de 27 étages revient à l’agenda. Derrière ce
projet on retrouve une pyramide, avec au sommet Vauban Invest. Selon l’Autorité
des marchés financiers’ «cet Invest SC a consenti des prêts importants à la
société Esplanade de la Paix One. L’investisseur court le risque de perdre tout
ou partie de son investissement». Le 25 mai 2021 Vauban Invest SC a pris 100%
des actions de Green Crest Investment Capital One scrl. La valeur a été calculé
sur une base d’une valeur du projet ‘Herstal’ de 7.360.000€. Green Crest est propriétaire de 100% de
Esplanade de la Paix One et Esplanade de
la Paix Two, constituées en 2015, avec siège au CAP Business center, rue
d’Abhooz 31 : une adresse boîte aux lettres. Fin 2019 les fonds propres de
ces deux sociétés étaient négatifs. La Two a les même gérants et est
probablement une société dormante, au vu du capitaux propres faibles.
Et c’est à ce genre de projets spéculatifs que
l’agence immobilière sociale de
Herstal prêterait son concours (un dixième des 200 logements serait géré par l’AIS) ?
L’Impasse Serwir, dans la rue Hayeneux
Cette impasse a été construite en 1910 par le
négociant Michel Serwir-Simonon, dans un ancien magasin. Il achète en 1913 26
maisonnettes Champ des Oiseaux à son frère Florent Martin Joseph
Serwir-Simonon, négociant de la rue Hayeneux. Un bel exemple d’habitat ‘social’
typique du 19° siècle qu’on appelait caser, impasse, allée, ruelle, cour ou carré.
Fin 2019 Luc SERWIR de Sint Niklaas, le
petit-fils de Florent contacte le musée. Il essaye de savoir pourquoi son
grand-père a quitté Herstal en 1912. Il croit qu’il a probablement déménagé
suite à un mur qui s’est écroulé sur un enfant qui a été tué. Je ne sais pas où
il en est avec ses recherches. La famille Serwir n’est pas sur la paille
aujourd’hui. C’est la famille fondatrice de l’Hotel SERWIR àn Sint Niklaas.
La rue Hayeneux compte quatre impasses. En
2007 le Schéma directeur de la Rénovation Urbaine Z.I.P. – Q.I. QUARTIER
MAREXHE constatait que « l’entrée
de l’Impasse Serwir constitue un danger pour ses habitants, des débris
tombent régulièrement dans le passage ; elle fait l’objet d’un étançonnement
mais c’est insuffisant. L’entrée qui prolonge cette ruine est formée d’un
couloir que constitue une rangée d’habitations peu confortables et en mauvais état. Cette
impasse est étroite et l’accès pompier y est difficile. Le problème de cette impasse est que tout est du
domaine privé, à savoir que le couloir
d’accès appartient à chaque habitation qui constitue l’impasse. Il
s’ensuit que les problèmes d’éclairage,
de revêtement de sol et de propreté incombent aux différents propriétaires et non à la Commune ». Début 2015 la Ville a pu racheter « le numéro 114 de la rue Hayeneux ainsi que les 1 et 2 de l’impasse. Ces deux derniers logements ont été
rasés. Le fonds wallon du logement a un bail emphytéotique sur le n°114 qui y a
aménagé au rez-de-chaussée, un logement pour personne à mobilité réduite et, à
l’étage, un logement pour famille nombreuse».
La Maison de quartier de Hayeneux
Au n°53, une maison en style Art Nouveau de
Victor Rogister, https://fr.wikipedia.org/wiki/Victor_Rogister
un des architectes les plus productifs Art
Nouveau. Dans le cadre de la rénovation urbaine du «Pôle Hayeneux» on a
construit une Maison de quartier (deux grandes salles de 200 m² et 184 m², une
plus petite salle de 67 m²), un boulodrôme, une esplanade polyvalente, un
espace vert, une conciergerie et un parking souterrain. Seul hic : les
Fonds FEDER imposent un partenariat Public-Privé. En mars 2018 Herstal a donc
lance un marché de «concession de services» afin de désigner un exploitant. Il
n’a pas trouvé. Les espaces sont aujourd’hui de temps en temps loué par la
Ville, mais si cette situation perdure ça sera un autre éléphant blanc !
Nous rejoignons le Ravel Rail via la rue des
Ecoles. Ces écoles ont été démolies à causes des mouvements de terrain du au
charbonnage, sauf le tout dernier qu’on a transformé en appartements.
Mes
blogs en rapport avec cette balade
http://hachhachhh.blogspot.be/2014/02/balade-sur-les-coteaux-de-vivegnis-des.html
http://hachhachhh.blogspot.be/2014/03/sur-lesplanade-saint-leonard-grave-dans.html
http://hachhachhh.blogspot.be/2014/11/balade-sante-mplp-de-belle-vue-et-de.html
balade avec le comité des patients de la
maison médicale de la rue Maghin dans
leur quartier. http://hachhachhh.blogspot.be/2015/10/balade-du-comite-des-patients-de-la.html
Sur le Ravel rail http://hachhachhh.blogspot.be/2014/12/balade-sante-mplp-sur-les-traces-des.html
Sur l’armurier Gosuin
http://hachhachhh.blogspot.be/2013/10/gosuin-un-grand-leader-de-la-revolution.html
http://hachhachhh.blogspot.be/2013/08/1792-1808-gosuin-revolutionne.html
1792-1808 Gosuin révolutionne l’armurerie à Liège
Sur la bataille de Rhées, et l’attaque du QG
du général Leman, dans l’actuelle rue Cdt Marchand http://hachhachhh.blogspot.be/2014/02/la-bataille-de-rhees-du-5-aout-1914.html